QuébecoFolies
par Laurent Saulnier
dans VOIR, 25 juin 1998
Article

Ma première moitié de FrancoFolies a été surtout québécofolle, histoire de voir ou de revoir certains de nos artistes favoris. Comme Jean Leloup, par exemple, qui revenait au Métropolis, dimanche soir, avec ses Naufragés du Titanic pour un spectacle quasi exemplaire. Seul défaut, et encore là, c'est vraiment se plaindre le ventre plein, il fut juste un peu trop long. Monté sur scène à 21 h 20, Leloup était encore là trois heures plus tard, lorsque j'ai dû le quitter pour aller jeter une oreille à Passi, dont le concert débutait au même moment au Spectrum.

Leloup était donc dans une forme éblouissante pour nous présenter un joyeux mélange de grands succès (Sang d'encre, Cookie, Edgar, Printemps-été, Alger, Le Dôme, Isabelle, La Chambre, etc.) et un paquet de toutes nouvelles chansons jamais endisquées. Ça, c'est le grand bonheur d'assister à un concert de Leloup. Il est un des rares - et peut-être même le seul - à avoir le courage de nous offrir autant de chansons inédites dans un même spectacle.

Et c'est ce qui fait qu'on a régulièrement envie d'y retourner. Pas pour entendre les chansons que l'on connaît déjà par coeur. Pour écouter celles que l'on ne connaît pas. Qu'on apprend à connaître et à aimer. Essayer de trouver le groove de Leloup, toujours aussi bien entouré (Mark Lamb à la guitare, Alex Cochard à la basse, Alain Bergé à la batterie, en plus de deux choristes que le chanteur ne nous a pas présentées...), toujours à l'aise à réarranger ses vieilles chansons, toujours plus fringant lorsque vient le temps d'en présenter de nouvelles.

Tiens, si je ne me retenais pas, je crois bien que j'irai en prendre une autre rasade le 28 juin, toujours au Métropolis.

Un autre qui était dans une forme extraordinaire en fin de semaine, c'est Kevin Parent, à qui on avait offert une Carte Blanche, le 19 juin, à la salle Wilfrid-Pelletier. Lui aussi nous a présenté un savoureux mélange d'ancien et de nouveau, de Pigeon d'argile (dont une version de Seigneur particulièrement bien sentie...) et de Grand Parleur Petit Faiseur (duquel on a surtout remarqué Si seul).

Mais ce qu'il faut souligner, c'est l'entrain avec lequel il l'a fait. Rarement vu Kevin en aussi bonne forme. Rarement vu Kevin communiquer avec autant d'aisance avec son public. Rarement vu Kevin avoir autant de plaisir à chanter, à jouer de la guitare, à juste être là. Plaisir éminemment contagieux puisque le public présent était délirant. Mais vraiment délirant.

Et Parent a pris l'expression Carte Blanche au pied de la lettre, invitant d'entrée de jeu deux artistes gaspésiens virtuellement inconnus qu'il tenait à nous présenter, dont Yan Brière, qui s'est véritablement démarqué. Les autres invités étaient beaucoup plus connus: Luce Dufault, France D'Amour, les guitaristes Rick Haworth et Steve Hill (pour une version lourde d'All Along the Watchtower, écrite par Dylan, mais popularisée par Hendrix), le violoncelliste Eric Longsworth, etc. C'était comme un gros party de famille. Une grosse famille gaspésienne...

Parlant de party de famille, j'ai également assisté à celui des Fabuleux Élégants (samedi soir, au Spectrum), mettant en vedette le batteur Bourbon Gautier en tannant intégral, le guitariste Jeff Smallwood en adolescent rêveur, le guitariste Patrick Norman en mononcle qu'il fait bon bousculer, et le bassiste belge William Dunker en cousin éloigné, toujours prêt à rire d'une bonne blague, fût-elle à ses dépens.

Si la première partie m'a semblé décousue (trop de jokes et pas assez de musique enchaînée), la deuxième donnait une bonne indication de la qualité du groupe lorsqu'il se met à véritablement jouer. Bien sûr, tout était toujours un peu lousse, les quatre joyeux lurons n'étaient pas toujours tight, mais le fun noir qu'ils avaient sur scène a largement débordé dans la salle.

Il me faut aussi vous parler de notre nouvel ami, Mario Peluso, qui chantait sur une scène extérieure de Francos, jeudi dernier. Il me faut vous en parler parce que malgré les inconvénients de départ (problèmes de son, trous de mémoire, nervosité chronique, etc.), malgré le fait qu'il s'agissait de son premier ou deuxième show avec le groupe; malgré le manque d'assurance flagrant de sa voix; bref, malgré tout (comme l'indique le titre de son premier l'album...), Mario Peluso nous a fait la preuve qu'au-delà de tout, lorsqu'on a de bonnes chansons (et les bonnes, dans son cas, sont nombreuses), on réussit à tenir son public. On en demande déjà plus.

Dans un tout autre genre, soulignons également la performance de Rainmen, qui en était, eux aussi, à leurs premières armes sur scène, et qui étaient aussi présents à l'extérieur. Là également, malgré de sérieux problèmes de son qui sont venus anéantir tous les efforts du groupe en fin de parcours, on a quand même senti l'importance que pouvait prendre Rainmen au cours des prochains mois. Bons gros beats lourds et efficaces, ambiance bien sombre, street credibility poussée au maximum, loin du positivisme de bon aloi, sans toutefois jamais tomber dans l'excès inverse et tenter de nous faire croire que Montréal est l'équivalent de South Compton. Eux aussi, on les tient à l'oeil...

(Article original)


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Dernière mise à jour le 31 juillet 2000.
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