Festival d'été de Québec: Une tension festive
par David Cantin
dans Le Devoir, 9 juillet 2001
Article

Depuis jeudi dernier, ça bouge amplement au Festival d'été de Québec. Dans le bon et le mauvais sens du terme.

Pour des raisons un peu nébuleuses, Manu Chao décide d'annuler, à la dernière minute, son point de presse prévu en ouverture. La chanteuse macédonienne Ezma Redzepova se voit refuser un visa de la part du gouvernement canadien et il semble que la même situation risque de se reproduire avec l'artiste malien Ballaké Sissoko. Les organisateurs ont été contraints de devancer les représentations du Faust des Baladins du Miroir, sous le chapiteau au parc de l'Esplanade, puisqu'on pouvait entendre clairement les rythmes ensoleillés de Manu Chao qui résonnaient des Plaines lors de la première. De plus, en salle, l'achalandage s'annonce plutôt timide. Au d'Auteuil, particulièrement, on est loin de l'ambiance électrisante qui régnait l'année dernière. Heureusement, la situation ne peut que s'améliorer.

Vendredi soir, malgré un temps froid et pluvieux à souhait, des milliers de jeunes s'étaient quand même rendus au parc de la Francophonie pour entendre le punk, à saveur californienne, de Home Grown et Real Big Fish. Rien n'allait arrêter ces mordus venus voir sur scène de la visite aussi rare au Festival d'été. On a eu droit à de la pop rebelle, plutôt inoffensive, qui semblait plaire aux moins de dix-huit ans. Copie conforme de NOFX, Home Grown réinvente bien peu et manque surtout d'imagination. Le trio d'Orange County a fait rapidement compte tenu du temps changeant. Plutôt que de revendiquer une quelconque détresse sociale, la formation misait sur une reprise bouffonne de l'insupportable Barbie Girl d'Aqua. Du punk prévisible qui se répétait, sans cesse, d'une pièce à l'autre. Côté texte, on repassera aussi. En deuxième partie, le ska énergique de Real Big Fish avait l'avantage d'être beaucoup plus efficace. La section de cuivre apportait une touche ludique à la prestation honnête du groupe. Une musique qui s'enrobe d'un humour adolescent, d'une énergie joyeuse et beaucoup de dérision. Real Big Fish répondait, clairement, aux attentes. Rien qui ne se compare, cependant, à la fureur mémorable de Manu Chao la veille sur la scène Bell. Dans un registre fort différent, quelques heures plus tard au d'Auteuil, les Lyonnais de la Cosmik Connection resteront sans doute en mémoire comme l'une des plus heureuses découvertes de cette 34e édition. Ce mélange de drum'n'bass, de jazz et de dub comble dans la profondeur de ses recherches électroniques. Il faut voir, à l'oeuvre, le batteur Philippe Garcia qui apporte à cette musique des contrastes étonnants. On pense à une rencontre pleine de fougue entre Roni Size, Asian Dub Fondation et l'esprit du Sound System jamaïcain. Toutefois, il aurait été sympathique de croiser une foule plus nombreuse dans ce bar-spectacle un peu mort.

Samedi, c'était au tour de Jean Leloup de revenir faire son numéro au Festival. Curieusement, on a rarement vu l'interprète d'Edgar aussi mal à l'aise sur scène. Entouré de quatre musiciens, dont deux nouveaux, il enfilait ses succès à une vitesse démentielle. À d'autres moments, il étirait certains morceaux sans trop de conviction. Le public en redemandait, mais la folie n'y était pas. Est-ce que notre John The Wolf se ferait vieux par hasard? Il a pourtant été généreux dans le choix des titres; d'Alger à La vie est laide, en passant par Barcelone et Cookie. Parmi les bons coups, on souligne la présence du trompettiste Jean-François Gagnon, de Vénus 3 qui ouvrait la soirée, pendant Isabelle. Une collaboration qui a semblé plaire à Leloup. Après deux rappels, se terminant sur Le monde est à pleurer, le chanteur et guitariste imprévisible est parti plutôt rapidement sans dire un mot. On l'avait déjà vu en meilleure forme. Quant à Vénus 3, en ouverture, la formation de Québec s'est plutôt bien tirée d'affaire. La chanteuse Vicky Martel a fait preuve d'une bonne présence sur scène et les spectateurs semblaient apprécier. Un pas en avant donc.

Ce soir on imagine qu'une foule des plus imposantes se déplacera pour entendre Nancy Dumais et surtout Bruno Pelletier sur les Plaines. Du côté du parc de la Francophonie, le Gala ça m'chante encourage les jeunes auteurs de demain. On pourra voir, notamment, les Pop Mécanik, Philippe Lafontaine et Luck Mervil à l'oeuvre. Pour les plus aventureux, on recommande de se diriger vers le cabaret du Festival afin découvrir le jazz-électro d'Erik Truffaz. Après coup, pourquoi ne pas terminer la soirée en compagnie des Couch Potatoes au d'Auteuil. On dit beaucoup de bien de cette house live des plus survoltées. On en reparle mercredi.


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Dernière mise à jour le 17 juillet 2001.
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