Une fête bien trop sage au Spectrum
par Richard Labbé
dans La Presse, 17 octobre 1997
Critique

Le méga-party tant attendu n'aura pas eu lieu. Hier soir, le Spectrum, qui célébrait ses 15 ans de «vie artistique», accueillait entre ses murs du bien beau monde. Une quinzaine d'artistes bien d'ici, en fait. Et pas les moindres : Éric Lapointe, Richard Séguin, Lhasa De Sela, Zachary Richard, Marjo, Daniel Lavoie, Jean Leloup, Paul Piché et autres Michel Rivard étaient sur place, histoire de porter un toast bien mérité à cette noble salle de la rue Sainte-Catherine. Malgré cette belle brochette, le croirez-vous, le feu n'y était tout simplement pas.

Les ingrédients d'une belle soirée semblaient pourtant mijoter bien fort, vers 20 h 30. Dans le hall, les sourires étaient nombreux, comme les ballons et les verres de vin qu'on sirotait allègrement, avant de se faire la bise à gauche et à droite sous le cliquetis interminable des caméras. Les gens des médias, vous l'aurez deviné, étaient bien présents - et assoiffés - tout comme les producteurs, artistes, réalisateurs et autres membres du gratin qui entraient à pleines portes. Seuls les sans-abri couchés à l'entrée ne semblaient pas avoir le coeur à la fête...

Mais bon. Nous étions là pour fêter, tout de même. L'ennui, justement, c'est qu'il était pratiquement impossible de s'amuser avec ces caméramen qui entraient en trombe dans les allées, ou ces techniciens qui hurlaient à tue-tête. Le gros show d'hier soir se déroulait sous les lentilles de Radio-Canada - qui diffusera tout ça le 9 novembre - et on avait souvent l'impression d'assister à une émission de télé, non à un spectacle. Ces longues pauses entre l'arrivée des artistes étaient d'ailleurs très irritantes

Et il y avait le public, plutôt distrait, qui n'aidait en rien. À l'arrière, on papotait plutôt qu'écouter, ce qui résultait en plusieurs «chuuuuuut!» de la part de spectateurs mécontents. Avec la formule unplugged qui prévalait hier soir, ces bla-bla s'avéraient hautement agaçants.

Les bons moments? Marie-Lise Pilote, qui lance tout bonnement que «ça fait 15 ans que les artistes viennent se produire sur cette scène... et se reproduisent dans les loges», Zachary Richard et Michel Rivard en duo pendant Marjolaine, le spleen savoureux de Lhasa, le Y'a pas grand-chose dans le ciel à soir de Piché, et l'inénarrable Guy A. Lepage, peut-être le seul à capter l'attention du public avec ses fax, dont celui de Robert Charlebois qui affirmait avoir vendu «plus de bière que de billets».

«L'âme de cette salle, c'est les artistes québécois», disait pendant l'entracte André Ménard, co-proprio du Spectrum. «À soir, il y a un feeling agréable.» Feeling agréable, peut-être. Mais sans plus. Hier soir au Spectrum, nous étions tous un peu las. Et un peu déçus. Comme on peut l'être par un rendez-vous manqué.

Photo: Denis Courville. Zachary Richard et Michel Rivard, en duo pendant Marjolaine, ont offert hier soir l'un des rares bons moments du spectacle.
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Dernière mise à jour le 17 décembre 2004.
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