Show de l’année de la francophonie canadienne: En français, s’il-vous-plaît!
par Catherine Morency
dans Impact Campus, 30 août 1999
Critique

Qu'ont en commun Jean Leloup, Youssou N'Dour et Alliance Ethnik? Et que diantre voulait-on leur faire livrer en les propulsant sur une même scène, précédés d'un groupe de percussionnistes acadiens et d'un duo de voix directement débarqué de Saskatoon? C'est une question qui a travaillé plusieurs journalistes avant que le fameux «Show de l'année de la francophonie canadienne» ait lieu, le 14 août dernier, sur la scène géante des Plaines d'Abraham.

Il n'existait pas d'endroit plus indiqué pour lancer cette tournée de cinq méga-concerts, qui sera ensuite de passage à Moncton, Sudbury, Toronto, puis Montréal. En effet, c'est comme si le site des Plaines avait fait un pied de nez à l'histoire en accueillant l'une des plus belles délégations francophones que la ville de Québec ait reçu en ses murs de mémoire d'homme. Ceci dit, ce spectacle fut tout sauf un pamphlet politique, et il n'avait d'ailleurs pas été annoncé comme tel.

Lors de la conférence de presse, les artistes s'étaient bien gardé d'afficher leurs couleurs ou de se prononcer sur leurs relations avec le principal organisateur et commanditaire de la fête, à savoir le Gouvernement du Canada. C'est un Jean Leloup amusé et comme toujours débonnaire, qui s'est contenté de rigoler un peu au nez du «concept» très abstrait et parfois obscur qu’est la francophonie en répondant tout simplement à un journaliste qui lui demandait pourquoi aller voir ce show : «parce qu'il n'y a rien d'autre à faire à Québec!».

Un peu plus posé (pour ne pas dire articulé...), Youssou N'Dour, le roi de la pop africaine, s'est dit honoré de représenter l'Afrique francophone, qu'il considère comme «l'un des membres actifs d'une grande famille dont les liens se resserrent peu à peu, grâce à des événements comme celui-là». D'après lui, «les Occidentaux ont une image faussée de l'Afrique, qu'ils perçoivent comme un monde confiné à la misère. Si je peux transporter en Amérique un peu de cette Afrique souriante qui m'anime, j'aurai accompli mon mandat d'ambassadeur».

Il n'y avait pas que le chantre sénégalais qui avait des clichés à mettre au placard et des préjugés à faire voler en éclats: le groupe Amérythme, formé de quatre percussionnistes acadiens, ainsi que les deux voix féminines venues de la communauté francophone de Saskatoon et appelées communément Polly-Esther étaient venus pour montrer aux Québécois qu'ils ne sont pas les seuls à vivre en marge au Canada. Pour eux aussi, la langue française est un joyaux qui vaut bien plus que tout l'or du monde. Complété par le groupe Hip Hop de l'heure en France, Alliance Ethnik, cette famille reconstituée a fait beaucoup mieux qu'un bon cliché pour les albums du patrimoine.

Tous ces musiciens, n'ayant à la base que les mots en commun, ont prouvé une fois de plus que la musique n'a qu'une couleur lorsqu'on se met tous au diapason. Ainsi, la foule n'a probablement déjà plus en tête d'avoir assisté à une création de l'année de la francophonie canadienne, mais plutôt d'avoir dansé chaudement au rythme d'un duo imprévu et combien explosif: Youssou N'Dour et Jean Leloup, unis devant Québec en délire, auréolés d’étoiles.

(Article original)


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Dernière mise à jour le 17 janvier 2001.
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